Dédougou : Il faut agir pour la cause des travailleurs autour du fleuve Mouhoun (vidéo)

Pays enclavé, le Burkina Faso rencontre d’énormes difficultés liées à l’eau. C’est pourquoi, conscient de l’état du pays, le gouvernement burkinabè travaille à donner différents cours d’eaux aux populations, et à construire des barrages. Trois fleuves sont identifiés dans le pays. Il s’agit du fleuve Nakambè, celui Nazinon et le plus grand et important qui est le fleuve Mouhoun. A travers un reportage, nous-nous sommes intéressés à ce dernier, qui passe par la Boucle du Mouhoun à douze (12) kilomètres de la ville de Dédougou.

Autrement appelé Volta Noire, le fleuve Mouhoun prend sa source au Sud-Ouest de la ville de Bobo-Dioulasso au Burkina Faso. Il est long de 1352 kilomètres et coule au Ghana et en Côte d’Ivoire. Le Mouhoun est un cours d’eau pérenne, c’est-à-dire s’écoule sans interruption tout au long de l’année. Selon l’histoire, c’est le fleuve Mouhoun qui a favorisé l’installation des gens à Badala.

Des gens qui doivent leur vie au fleuve 

A Dédougou, plusieurs personnes vivent du fleuve Mouhoun. En effet, il permet à plusieurs personnes de mener des activités. Il s’agit notamment de la pêche, le jardinage, l’élevage et le commerce. L’on rencontre des personnes qui font de la pêche leur activité principale, mais aussi d’autres qui la pratiquent comme un passe-temps. C’est l’exemple de Sia Taro.

Sia Taro, fonctionnaire de l’Etat

Ce fonctionnaire de l’Etat vient souvent passer du temps à Badala et profite pratiquer la pêche. Selon son propos, l’air autour du barrage est pur. « Au bord du fleuve, il y a une certaine lueur qui se dégage et l’air est pur. Je viens ici à mes temps libre pour me détendre. Ma distraction, c’est la pêche », a laissé entendre monsieur Taro. Il a indiqué qu’il gagne du poisson quand il pêche et c’est pour lui, une motivation. Sans aucun doute, le fleuve Mouhoun contient du poisson mais n’est pas capable de satisfaire même la moitié de la demande. Cette situation conduit des commerçants à quitter Dédougou, dépasser Badala et continuer au Mali pour chercher du poisson afin de revenir vendre à Dédougou, Ouagadougou et Bobo Dioulasso. Chaque semaine, Doro Abdoulaye et son acolyte partent au Mali pour acheter du poisson et revenir au Burkina. « Nous menons cette activité et nous arrivons à nous en sortir. Nous partons au Mali parce que nous ne gagnons pas de poisson ici », a confié monsieur Doro. Non loin de cette localité, des femmes font le commerce de poissons.

Du poisson pêché dans le fleuve vendu par les femmes

Elles achètent le poisson avec les pêcheurs, les fument puis les revendent à d’autres personnes. Awa Koné et ses amies y sont installées depuis quinze ans environ. La difficulté est que les pêcheurs n’arrivent pas à combler leur besoin. Elles sont obligées de prendre le poisson avec des revendeurs qui viennent du Mali. Et si vous pensez que vous faites une bonne affaire en achetant le poisson avec les femmes au bord du fleuve, vous-vous trompez complètement, parce que le poisson y est encore plus cher que dans la ville de Dédougou. Il faut croire que le poisson qui vient du Mali est encore moins cher que celui du fleuve. Et Pourquoi ? Cela pourrait s’expliquer par la différence de la qualité du poisson. Pourtant, elles ont affirmé prendre le poisson avec des commerçants qui partent au Mali et reviennent avec leur marchandise. Paradoxalement, la réponse à notre question demeure toujours inconnue. Cette activité n’étant pas aussi rentable, Dame Koné s’est lancée dans le jardinage pour pouvoir améliorer son rendement.

Le champs de M. Belem

Autre que la pêche, il y a le jardinage qui est pratiqué par plusieurs personnes. C’est essentiellement la famille solanacée (aubergine, tomate, piment, poivron) qui est entre autres, cultivée. Cette activité permet à plusieurs ménages de joindre les deux bouts. Il faut le dire, c’est l’activité la plus rentable qui se pratique au bord de ce cours d’eau. D’ailleurs, c’est l’activité principale de Belem Karim qui, depuis environ 10 ans, fait ce métier de jardinage. Il cultive avec ses frères et amis, puis arrive même à embaucher d’autres personnes dans son domaine d’activité. Ils ont installé des machines qui leur permettent d’aspirer l’eau du fleuve pour pratiquer l’agriculture contre saisonnière.

La machine servant à aspirer l’eau afin d’arroser le jardin de M. Belem

Cependant, ils ont des problèmes avec ces machines qui se gâtent vite et consomment un peu trop de gasoil. Le champ se trouve à plus de cent (100 mètres), alors il faut une telle machine pour permettre à monsieur Belem de mieux arroser son champ avec la grande facilité. La grosse difficulté de ce monsieur se trouve au niveau de l’écoulement de son produit. Il aimerait vendre sa récolte avec les burkinabè mais ces derniers ne paient pas bien, selon son propos. Il préfère donc l’écouler avec des acheteurs qui viennent de Togo et du Ghana car avec eux, il fait plus de bénéfice. Mais que se passe-t-il en réalité ? Cela pourrait s’expliquer par le fait que les acheteurs burkinabè sont en réalité des revendeurs. Ainsi, ils achètent à coût bas pour revendre avec des personnes d’autres contrées qui vont transformer ces produits chez-eux avant de les exporter. Donc, le manque de grandes usines de transformation est un handicap pour le Burkina Faso. Belem Karim mène bien son activité et nourrit sa famille tranquillement. Sa vie, c’est le jardinage. Il est obligé de passer des nuits dans son champ parce qu’il y a d’autres activités autour du barrage qui pourraient impacter la sienne. Il s’agit de l’élevage.

L’élevage autour du fleuve

En plus de la pêche, du commerce et du jardinage, l’élevage est l’une des activités menées aux environs du fleuve. C’est surtout l’élevage des bovins (bœufs, vaches, taureaux, veaux) qui est remarqué. L’eau du fleuve permet aux éleveurs de mener à bien cette activité. L’herbe pousse bien dans cet endroit au profit des animaux. Drôle de collaboration, les éleveurs et les jardiniers font ménage même si cela se passe aussi difficilement car chacun connait ses limites. Dans cette localité, les espaces réservés aux éleveurs ne seront pas occupés par les jardiniers et vice versa. C’est un exemple de vivre ensemble qui devrait inspirer d’autres localités du pays où les agriculteurs et éleveurs se font souvent “la guerre“ à boulet de canon.

Une insécurité menaçante

C’est un sujet abordé difficilement par les personnes que nous avons rencontrées ; la question de l’insécurité. La région de la Boucle du Mouhoun est menacée par l’insécurité et les individus armés non identifiés y patrouillent de temps en temps surtout à Badala. C’est la peur qui anime les travailleurs de cette localité. Ne sachant faire autre chose que leur activité habituelle, ils ne comptent pas abandonner malgré la présence signalée des individus armés. « Nous ne savons faire que ce travail. Nous allons laisser pour mourir de faim ? », question posée par un travailleur. Nous évitons de donner un nom à ce niveau car ces personnes deviennent subitement froides quand on aborde la question du terrorisme avec eux. La zone est menacée et certains habitants de Dédougou n’osent pas y mettre pied. Quel sera l’avenir pour toutes ces personnes autour du fleuve qui gagnent leur vie, si la situation devient chaotique ? Vivement des actions concrètes pour un retour à la paix, afin que les travailleurs puissent mener tranquillement leurs activités pour le développement de notre chère patrie.

Depuis la construction du nouveau pont qui rallie Dédougou à Nouna, le trafic sur l’ancien pont est déconseillé. Mais force est de constater que les gens continuent de l’emprunter au risque de tomber dans l’eau, parce que les barrières à certains niveaux ne sont pas solides. Par certains endroits, elles sont carrément cassées.

Ce qu’il faut faire

L’ancien pont dont le trafic est déconseillé

Il faut des actions fortes pour de meilleures prises en charge du fleuve. Il y a l’Agence de l’eau du Mouhoun (AEM) qu’on voit à travers. C’est une plaque qui définit les pratiques interdites au bord du fleuve. Elle sensibilise les acteurs sur la gestion de l’eau. C’est d’ailleurs une actions saluée par les acteurs autour du fleuve, qui soulignent que grâce à l’AEM, ils savent ce qu’il faut faire, et à quelle distance faut t-il être pour pouvoir mener à bien les activités. C’est entre autres, la construction de maquis, de bâtiments, la fabrication des briques et le lavage des habits et auto-moto. Mais encore plus d’actions à venir, bénéficieraient beaucoup. Pourquoi pas curer le fond du fleuve, planter encore plus d’arbres et trouver des stratégies pour améliorer la quantité et la qualité des poissons. Mieux, organiser les travailleurs et promouvoir les grandes usines de transformation, afin d’aider les jardiniers à participer davantage au développement du pays. Également, outiller conséquemment les services de gérances d’eau pour leur permettre d’en prendre soin avec la meilleure des manières.

La plaque de l’AEM fixée au bord du fleuve

Nous avons pu rentrer en contact avec l’AEM. L’Agence de l’Eau du Mouhoun (AEM) est un Groupement d’Intérêt Public convenu entre l’Etat, les Collectivités Territoriales et des Usagers de son espace de compétence à travers une convention constitutive signée le 23 janvier 2010. L’agence couvre six régions que sont : les régions du Nord, du Centre-Ouest, de la Boucle du Mouhoun, des Hauts-Bassins et des Cascades. Selon le Directeur de l’Assistance Technique, du Partenariat et de la Coopération, Soumbougma Armel, il est organisé en Comité de Bassin, Conseil d’Administration, Direction Générale et Comités Locaux de l’Eau. Avec son siège à Dédougou, l’Agence de l’eau du Mouhoun a pour missions fondamentales, la promotion et l’utilisation rationnelle des ressources en eau, la lutte contre la pollution et la protection des milieux aquatiques. Aussi, engager les acteurs à la gestion intégrée des ressources en eau, traduire la politique nationale de l’eau et percevoir des taxes selon le principe pollueur-payeur » ou « préleveur-payeur ».

Armel Soumbougma, Directeur de l’assistance Technique, du partenariat et de la coopération de l’Agence de l’Eau du Mouhoun

L’Agence de l’Eau du Mouhoun à travers les Comités Locaux de l’Eau (CLE) Mouhoun Tâ pour la zone de Dédougou, mène différentes actions pour protéger l’eau. Il s’agit entre autres, de la protection des berges du fleuve Mouhoun, ses affluents et les retenues d’eau par la réalisation de mesures biologiques (reboisement, bandes enherbées) et des mesures physiques (colmatage de brèche, gabionnage, diguettes filtrantes et délimitation des bandes de servitude). Il y a également la connaissance des ressources en eau de surface et souterraine, l’allocation des ressources en eau, la lutte contre les mauvaises pratiques d’orpaillage, le désensablement des retenues d’eau, sans oublier la sensibilisation des acteurs sur les bonnes pratiques de gestion et de protection des ressources en eau. Cependant, l’AEM rencontre certaines difficultés en l’occurrence, le non-respect des bandes de servitude des cours et retenues d’eau par les producteurs agricoles, les mauvaises pratiques d’orpaillage sur les berges des cours d’eau, la pollution des ressources en eau et l’ensablement des cours d’eau sont les maux qui minent cette administration.

Image du fleuve vue du pont Dédougou-Nouna

Sah Abdoul Latif

Faso Actu

1 Commentaire sur "Dédougou : Il faut agir pour la cause des travailleurs autour du fleuve Mouhoun (vidéo)"

  1. Encougeons les activités menées au alentour du fleuve,valoriser le fleuve mouhoun c’est lutter contre le chômage

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