Législatives au Bénin : les résultats définitifs proclamés sur fond de violences post-électorales

Après les grandes tendances données par la Commission électorale nationale autonome (Cena), c’est au tour de la Cour constitutionnelle du Bénin de faire connaître les résultats. Appris par Jeune Afrique, elle a proclamé les résultats officiels jeudi 02 mai 2019 à 20 heures dans un contexte marqué par une nouvelle journée d’échauffourées à Cotonou et de dénonciations d’un scrutin sans les partis d’opposition.

De nombreux Béninois attendaient que la Cour constitutionnelle, « en sa qualité de juge souverain de la validité des élections législatives », annule le scrutin du dimanche 28 avril marqué par une abstention record et des violences ayant empêché le vote dans 39 des 546 arrondissements du pays. Sur un ton ferme et empreint de solennité, le président de la Cour, Joseph Djogbenou, a proclamé le 2 avril les résultats définitifs de ces élections législatives.

S’il a relevé des « irrégularités, des actes de perturbation des opérations de vote (…) dans certaines circonscriptions électorales », il a néanmoins soutenu que ceux-ci n’étaient « pas de nature à compromettre la validité, la sincérité et la transparence du scrutin [et] qu’il y a donc lieu d’en valider les résultats ».

La Cour constitutionnelle ne s’est pas prononcée sur l’absence de l’opposition dans la compétition et a légèrement redressé les chiffres publiés dans la nuit de mardi à mercredi par la Commission électorale nationale autonome (Cena) : le nombre de votants, « constitué des électeurs qui ont valablement exprimé leurs suffrages et de ceux qui ont déposé des bulletins qualifiés nuls », est de 1 353 955 électeurs sur 4 992 399 inscrits, soit un taux de participation de 27,12%, un chiffre en hausse de cinq points par rapport au taux rendu public par la Cena. Malgré tout, ce dernier demeure le plus faible de l’histoire démocratique du Bénin depuis les années 1990 : les précédentes législatives (2015) ont mobilisé 66% des électeurs et il faut remonter en 1991 pour retrouver le taux jusqu’alors considéré comme le plus faible : 52%.

La décision rendue par la Cour ce jeudi ne comporte pas de chiffres sur les bulletins nuls, pourtant très attendus par l’opinion publique.

La Cour a publié les noms des 83 députés élus, soit 47 de l’Union progressiste et 36 du Bloc républicain, tous deux se réclamant de la mouvance présidentielle et raillés dans l’opinion comme deux « listes jumelles ».

Plus de 45% des députés de la législature sortante (38 députés sur 83) ont conservé leur siège. Six ministres du gouvernement actuel du président Patrice Talon ont réussi à se faire élire : Abdoulaye Bio Tchané, ministre d’État chargé du Développement, Sacca Lafia, ministre de l’Intérieur, Oswald Homeky (Sports), Fortuné Nouatin (Défense), Mahougnon Kakpo (Enseignement secondaire) et Alassane Seidou (Transports). Des ministres comme Jean-Claude Houssou (Énergie) et Adidjatou Mathys (Travail et de la Fonction publique) ont néanmoins échoué.

Les résultats proclamés par la Cour constitutionnelle demeurent provisoires et d’éventuelles contestations peuvent être portées devant elle dans un délai de dix jours. « La présente proclamation ne préjuge pas de l’issue des contestations qui pourraient entraîner l’invalidation de siège de députés », a déclaré la Cour.

Reste à savoir si cette compétition, considérée à Cotonou comme un « match amical » entre les forces de la mouvance, soulèvera des contestations. « Il y a peu de chances qu’elles aboutissent, dans la mesure où la Cour a l’habitude de trancher après avoir pris en compte la plupart des irrégularités », souligne le juriste Ernest Tokpo.

Pendant ce temps, la rue ne décolère pas. Hier, des échauffourées ont eu lieu dans les quartiers de Gbegamey et de Cadjeboun où réside l’ancien président Thomas Boni Yayi, dont les rumeurs de son arrestation, le mercredi, avaient déclenché des mouvements de soulèvements occasionnant d’importants dégâts matériels dans la ville. Sacca Lafia, le ministre de l’Intérieur, a reconnu que les policiers avaient tiré à balles réelles par « nécessité » et a promis des sanctions contre les policiers qui n’ont pas suivi la « consigne officielle » de ne pas tirer.

Les partis de l’opposition dont les dossiers de candidature n’avaient pas été validés par la Cena en raison des récentes réformes du code électoral et de la charte des partis politiques, réclament toujours l’annulation du scrutin et ont lancé un ultimatum au président Patrice Talon pour arrêter le processus électoral, un ultimatum qui s’est achevé mardi.

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